mardi 18 février 2014

Parts de Vous : Matt

Cela faisait longtemps qu'il n'y en avait pas eu sur le blog. Une Parts de Vous  (cliquez, tout y est expliqué) un peu spéciale car contrairement aux autres qui m'ont été envoyées spontanément, celle-ci, je l'ai réclamée! J'ai du batailler longtemps pour l'avoir  et finalement, c'est arrivé. 

Aujourd'hui donc, sur le blog, la parole est à Matt. Il y en a d'entre-vous qui le connaissez donc peut-être que vous ne découvrirez pas grand chose de nouveau. Matt ne parle pas beaucoup de lui en fait. Il ne parle pas de son caractère obstiné, curieux, un peu casse-cou, gentil, courageux, drôle et avec le sens de la répartie. Sans parler de son auto-dérision parfois corrosive! C'est pour ça que moi, j'en parle. Je lui ai demandé de raconter ce qui fait sa différence et ce qui le met au ban du monde du travail. Il le fait bien et ça percute. Il pose les bonnes questions.

La parole est à lui. Les commentaires sont ouverts et il y répondra. Alors n'hésitez pas!


LE geste. Cet ORL mimant les appareils autour des oreilles. C’est ainsi que tout commence. A cet instant, j’ai su que ma vie basculait, mais j’en ignorais bien sûr à quel point.

Petite à petit je découvre les allers retours chez l’ORL, les acouphènes permanents, les nombreux dossiers et justificatifs à fournir pour montrer que finalement, je ne fais pas semblant d’être malentendant, le traitement du dossier, qui peut prendre un an. Année pendant laquelle la personne n’a pas d’appareils si elle n’a pas les moyens de s’en payer. Le regard change également ; parfois moqueurs, la plupart du temps interrogatifs. Eh oui un travailleur handicapé qui n’est pas en fauteuil roulant, ça existe…

Et cette ignorance, je la prends parfois en pleine face. Par exemple, une personne me dit que c’est une sorte de favoritisme d’être travailleur handicapé, car finalement il ne me manque ni jambes ni bras. J’ai proposé à cette personne de prendre mes oreilles une semaine. J’ai trouvé étrange ce refus, au regard des nombreux avantages que cela engendre, selon elle. La méthode servant à déterminer le taux d’incapacité est également assez « amusante » il s’agit ici du taux de perte de la meilleure oreille. Je me demande si ils prennent la longueur de la plus longue jambe pour un amputé…

Il y a également cette catégorie de personnes (aussi bien dans mon entourage que professionnellement) qui pensent que finalement j’exagère un peu mes problèmes, alors ils continuent à m’appeler encore et encore, en se disant que comme je réponds, je n’ai pas tant que ça de problèmes.

Vient ensuite le volet professionnel. Derrière la communication bien huilée des entreprises mettant tout en œuvre pour intégrer des personnes handicapées se cache une réalité plus contrastée. Il y a tout d’abord la discrimination, vous savez ces entreprises qui sont très intéressées par votre profil, jusqu’à ces fameuses lettres RQTH, qui signifient en politiquement correct «  vous ne correspondez pas au profil recherché ». Quelle formule facile.
Et lorsque vient le précieux mail, celui de la réponse positive post entretien je me suis dis ça y est, je touche au but après une période assez courte finalement. STOP ce n’est pas du tout le cas. En effet, après une étude approfondie de votre dossier (une autre formule facile) nous sommes heureux de vous accueillir… au sein de notre call center. C’est assez cocasse pour une personne malentendante, sans parler du niveau de qualification requis pour renseigner les clients sur les horaires d’ouverture. C’est un petit peu comme si une société de taxis recrutait des chauffeurs déficients visuels, quelque chose de très logique en somme.

Je me moque mais c’est déjà bien d’embaucher un handicapé, quand même. Lui qui est faible, incapable, malade tout le temps et dont le poste de travail nécessite des modifications gargantuesques. Et surtout, il est parfaitement incapable de s’intégrer dans une entreprise. Il est également peu qualifié, ce sur quoi les entreprises insistent lourdement, sur les fameux diplômes, pour justifier l’impossibilité pour eux d’atteindre les fameux 6%.

Je terminerais donc par une simple question. Pourquoi nous? On m’aurait menti ? Un Master en alternance ne suffirait donc pas lorsque l’on est handicapé pour accéder à un poste acceptable ? A quels genre de poste avons-nous le droit, finalement. Derrière ces personnes « vitrine », quels handicapés ont le droit d’être ambitieux ? 
 

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